La tête vide

Je ne suis plus la fille de ma mère , elle ne sait plus mon prénom , elle ne sait plus si elle a été mariée ou divorcée , hier , elle me demandait si elle avait eu des enfants  . Plus rien ne s'imprime , je répète les paroles tranquillisantes comme : je viens le mardi et le jeudi , N.. vient le lundi et P... vient le mercredi et dimanche . Souvent elle me demande si elle dort là , les repères sont difficiles , toutes les portes se ressemblent , alignées dans un long couloir , elle ne sait pas rejoindre sa chambre . Et la plupart des pensionnaires sont comme elles, rares sont ceux et celles qui sont épargnés après 85 ans . Il est plus que temps de se préoccuper du grand âge , les locaux , le personnel  et, les finances .

Emotions éphémères

Hier était une journée cahotique pour ma mère , elle était dans une phase anxieuse et voulait se sauver de l'institution , si je pouvais , je me suiciderais , " ils n'arrêtent pas de me dire : arrêter de tricoter .Impossible de faire une promenade pour lui changer les idées , la bise soufflait fort , je l'emmène à la cafétéria , elle rencontre d'autres personnes mais , ses idées fixes reviennent : on l'empêche de tricoter .Je demande au personnel si ça va , elles m'apprennent qu'elle a été retrouvée à l'accueil avec son sac de tricot .Le visage est fermé , le regard un peu dément . Evidemment , je suis un peu ébranlée puis je me ressource en me disant qu'il y a des phases comme ça et qu'elle oublie trés vite . Effectivement , aujourd'hui , je la retrouve calme , tricotant , tout est oublié , elle me parle qu'elle a été à l'usine ce matin , je la resitue dans le temps et je la quitte en bonne forme . L'avantage d'Alzeimer : ce qui est dit hier est éffacé aujourd'hui .